Image de Delphine Ernotte.
Un nouveau mandat dans un paysage profondément transformé
La reconduction de Delphine Ernotte pour un troisième mandat à la tête de France Télévisions marque un tournant inédit. Depuis sa première nomination en 2015, elle a dirigé le groupe public avec constance, impulsant des changements importants : transformation numérique, modernisation des antennes, diversité à l’écran, ou encore développement de la plateforme france.tv.
Mais en 2025, l’audiovisuel n’est plus le même. Le temps des grands rendez-vous familiaux autour d’un prime est révolu. Les modes de consommation ont changé en profondeur : le public est fragmenté, mobile, exigeant. Et le rôle d’un groupe comme France Télévisions, censé refléter et rassembler la société, est plus complexe que jamais.
Un cap stratégique confirmé, mais des attentes renouvelées
Cette reconduction confirme la stabilité d’une gouvernance reconnue, dans un secteur parfois soumis à des à-coups. Mais sur le terrain, du côté de ceux qui créent, développent et produisent les contenus, un besoin de renouvellement se fait sentir.
Le modèle de la chaîne traditionnelle est en pleine redéfinition. Les jeunes générations, en particulier, ne s’identifient plus aux formats et aux narrations classiques. Trop souvent, la fiction française peine à les concerner, à leur parler directement, à capter leurs codes.
Ce n’est pas un constat pessimiste : c’est un appel à réajuster. La télévision publique ne peut plus fonctionner selon des logiques héritées d’un autre temps, quand les publics eux-mêmes ont muté.
Fiction jeunesse et nouveaux talents : des leviers à réactiver
Aujourd’hui, la fiction jeunesse est presque absente de l’offre de France Télévisions. Or, dans un paysage saturé de contenus venus des plateformes internationales, l’audiovisuel public a une carte culturelle à jouer. Produire pour la jeunesse, ce n’est pas répondre à une niche : c’est s’adresser à l’avenir.
De la même façon, les talents émergents restent trop peu représentés à l’écran. Pourtant, les récits originaux sont là. Les auteurs, les comédiens, les réalisatrices sont prêts. Ce qui manque, ce ne sont pas les idées, mais les accès. Les cases restent verrouillées, les formats novateurs peinent à percer.
Le troisième mandat de Delphine Ernotte est l’occasion d’ouvrir ces portes, de simplifier les circuits, d’oser davantage.
Un mandat qui engage l’ensemble de la filière
La question n’est plus de savoir si France Télévisions va évoluer : elle le fait déjà. La vraie question est comment elle associera les producteurs, les créateurs, les artistes à cette dynamique.
Ce troisième mandat offre une opportunité claire : celle de construire une gouvernance plus connectée aux réalités de la création contemporaine. Moins verticale, plus partenariale. Capable d’écouter ce qui émerge, et pas seulement ce qui rassure.
Les producteurs attendent un dialogue plus fluide. Les artistes, une reconnaissance plus directe. Et le public, des histoires qui lui parlent vraiment.
Vers un service public plus accessible, plus vivant, plus représentatif
Delphine Ernotte entame ce nouveau mandat avec une légitimité consolidée. Mais elle le fait aussi dans un contexte où la pression du réel est forte. Réel des usages, des attentes, des récits oubliés ou en manque de représentation.
C’est un moment à saisir. Car un service public audiovisuel fort ne se décrète pas : il se construit avec, pour, et grâce à celles et ceux qui en sont les artisans au quotidien.
J’ai confiance dans les capacités de notre secteur à se réinventer. À condition que les portes s’ouvrent plus largement, que la diversité des formats et des voix soit accueillie, et que l’audace redevienne une valeur centrale.