Par Nicolas Derouet, directeur de casting
L’intelligence artificielle est partout : dans nos téléphones, nos outils de travail, et désormais… dans le cinéma. Deepfakes, voix clonées, avatars numériques : la technologie progresse à une vitesse vertigineuse. Forcément, le métier du casting s’interroge. Faut-il craindre l’IA ou au contraire l’adopter comme un nouvel outil ?
La réponse tient en une phrase : on s’en sert, mais ça ne remplace pas l’humain.
Les craintes légitimes face à l’IA
Quand on parle d’IA dans le cinéma, la première peur est claire : le remplacement des comédiens. Avec les deepfakes, on peut recréer des visages ou rajeunir un acteur. Avec les voix de synthèse, on peut doubler un film entier sans studio d’enregistrement.
Mais ce progrès technique pose deux problèmes :
Un risque d’uniformisation : l’IA génère des visages et des voix parfaits, mais sans les nuances ni les imperfections qui créent l’émotion.
Une question éthique : de nombreux acteurs s’inquiètent déjà de voir leur image ou leur voix utilisée sans autorisation. Les productions doivent donc être particulièrement vigilantes sur les droits.
L’IA comme outil, pas comme substitut
Pour autant, réduire l’IA à une menace serait une erreur. Bien utilisée, elle peut devenir un formidable outil au service du casting et de la production.
Trier et analyser plus vite : lorsqu’une production reçoit des centaines de self-tapes, l’IA peut aider à filtrer et à dégager des tendances. Le directeur de casting garde l’œil artistique, mais gagne un temps précieux.
Expérimenter en amont : simuler une scène avec différents profils, tester un look, visualiser une transformation… L’IA devient un laboratoire créatif avant les essais réels.
Le rôle central du directeur de casting
C’est ici que l’humain reprend toute sa place. Car si l’IA aide à gagner du temps ou à visualiser des possibilités, elle ne sait pas détecter l’étincelle, le charisme, la profondeur qui font un acteur.
Le directeur de casting devient donc le garant de l’équilibre :
- Il apporte une lecture artistique que la machine ne peut pas reproduire.
- Il protège les comédiens en veillant aux droits d’image et d’usage.
- Il guide la production pour tirer parti des outils sans sacrifier l’authenticité.
Comme je peux le résumer:
« On s’en sert de l’IA, mais ça ne remplace pas l’humain. L’émotion d’un comédien, ça ne se code pas. »
L’IA n’est ni un danger absolu, ni une solution miracle. C’est un nouvel outil, qui peut transformer les pratiques de casting si on l’utilise avec intelligence et éthique.
Mais une chose reste immuable : au cinéma comme au théâtre, ce qui touche le spectateur, c’est toujours la vérité d’un acteur. Et ça, aucune machine ne peut le remplacer.